par Auguste Deslinières
Ces toits fantastiques,
Ces voûtes gothiques,
Ces clochers antiques
Brusquement surgis;
Ces palais, chapelles,
Places et ruelles,
Pignons et tourelles,
C'est le Vieux Paris.
Sans crier gare,
Le tintamarre
D'une fanfare
Surprend dès le seuil;
Chansons, tapage
Déjà font rage :
C'est le présage
D'un joyeux accueil.
Entrons ! La cohue
Emplit chaque rue,
où charment la vue
D'aimables minois :
Vendeuses coquettes,
Gentes bachelettes,
En fraîches toilettes
Du temps d'autrefois.
Des boutiquières
Très familières
Aux boutonnière
Fixent un bouquet :
Peu misanthrope,
Dans des échoppes
Vident des chopes
Des sergents du guet.
Près de toiles peintes
Aux criardes teintes
On vend des complaintes
Sur un crime affreux ;
Ailleurs des chateuses,
Ribaudes joyeuses,
Charment, capiteuses,
L'Oreille et les yeux.
Une voyante
Stupéfiante,
Vraiment troublante,
Lit dans le secret ;
Bouffon artiste
Et guitariste
Très fantaisiste,
Passe Sansonnet.
Cortège historique,
Tenue authentique,
Voici la musique
D'Etienne Marcel ;
Devant elle, immence,
D'unique prestance,
Le Géant s'avance
D'un pas solennel :
Invraisemblable
Quoique palpable,
Mais admirable,
C'est Gargantua
Qu'on nous exhume,
sous quel volume !
Dans son costime
Signé Robida.
Là, sur une place,
Pérore, cocasse
Janot la Paillasse,
Roi du boniment ;
La foule amassée
"Rigole", amusée,
Devant son musée
Abracadabrant.
La politesse
Règne en maîtresse :
"Marquise, altesse,
Prince, monseigneur..."
Je crois qu'on donne
A ma personne
De l'ambassadeur !
Sur le Pont au Change
Le public se range
Autour d'un étrange
Chanteur de vieux Airs (1) ;
Autre part on danse :
Fandango, romance,
C'est une abondance
De plaisirs divers.
Quartier des Halles,
Par intervalles,
Tambours, cymbales
Dominent les bruits :
Il est notoire
Qu'on peut se croire
Dans une foire...
C'est le Vieux Paris !
(1) Bobèche et sa troupe.
Cette poésie descriptive du Vieux Paris nous replonge dans l'univers médiéval parisien qu'Albert Robida avait recréé sur les bords de Seine lors de l'Exposition de 1900, et résume assez bien l'atmosphère du lieu, celle que l'on pouvait ressentir, telle qu'elle avait été voulue par le maître.
On y retrouve évoqués des personnages que nous connaissons déjà, Gargantua, personnifié au Vieux Paris par le Géant Hugo dont nous avons déjà parlé, ou cette voyante, la célèbre sorcière Michaella, ou le fameux Jano la Paillasse, dans leurs costumes médiévaux, conçus par Robida.
Ci-dessous, une photo du Vieux Paris non légendée, il y a fort à parier que ce sympathique bonimenteur soit Jano la Paillasse !
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